La Feuille de Myosotis
décembre 2024
L'année 2024 aura été une année particulière pour Myosotis. Tout d'abord, c'était l'année de ses 30 ans ! 30 ans qu'une petite équipe s'organise pour récolter des fonds en France et les faire parvenir à Santuario pour agir contre la malnutrition.
Beaucoup de choses ont évolué depuis la création de l’association par Thierry en 1994. Ces dernières années, nous avons progressivement laissé la main aux pouvoirs publics s’agissant des déjeuners quotidiens des enfants de l’école de Sagrados Corazones, et notre activité concerne désormais l’accompagnement de potagers pédagogiques.
Ces derniers, dont le suivi est assuré par les animatrices santuareñas de Corpocam, ont pour mission de sensibiliser différents publics à la sécurité alimentaire et de valoriser les savoirs et produits locaux, pour une alimentation harmonieuse avec la biodiversité, dans cette région touchée par la monoculture du café.
Cette année, nous avons continué de financer les frais d’achats de graines et matériel pour l’entretien des potagers, les déplacements vers les hameaux et l’indemnité de l’équipe de Corpocam. Ce sont en tout six potagers qui ont continué de produire leurs feuilles et fruits, utilisés dans les plats des enfants, les cuisines des familles et différentes préparations vendues sur le marché du village.
Cette année aura aussi connu de multiples défis et besoins de réorganisation. Corporam n'a pas obtenu de financements locaux, et il demeure difficile d'obtenir du soutien de l'Ambassade de France en Colombie. Cependant, l’année a été marquée par une bonne nouvelle : Rosa Inès Restrepo, caféicultrice reconnue, engagée dans la préservation de l’environnement et de la cuisine traditionnelle, membre fondatrice de Corpocam, a rejoint le projet lorsqu’il a le plus eu besoin de renfort. Nous vous invitons à lire l’article publié par un quotidien colombien à son sujet. La participation de Rosa au projet de souveraineté alimentaire nous donne de l’espoir.
Cependant, le fonctionnement des potagers continue de dépendre votre générosité.
Nous serons heureux de vous donner plus de détails lors de notre prochaine AG, qui se tiendra au mois de mars autour de la projection d'un petit film. Nous reviendrons vers vous pour la date et le lieu !
En attendant, nous nous joignons à l’équipe de Corpocam pour vous souhaiter de très joyeuses fêtes de fin d’année auprès de vos proches.



Récit de visite
Retour sur la visite par Lætitia, Anaïs et deux amies, au mois de mars 2024, de quatre potagers que nous soutenons : le potager situé dans une maison de retraite de Santuario, le potager communautaire du groupe de Mujeres Emprendedoras de la Esperanza, le potager communautaire de Peralonso et celui de Don Luis.
Nous avons commencé la journée par une visite du potager de la maison de retraite située sur les hauteurs de Santuario. Ici, le potager est cultivé par les membres de Corpocam et différents pensionnaires de la maison de retraite, notamment Don Salomon, qui est très investi. Les aliments produits sont cuisinés et consommés sur place par les résidents.
Dans l’après-midi, nous nous sommes rendues dans le hameau de 𝐋𝐚 𝐄𝐬𝐩𝐞𝐫𝐚𝐧𝐳𝐚 pour rendre visite aux femmes qui font partie du groupe 𝐌𝐮𝐣𝐞𝐫𝐞𝐬 𝐄𝐦𝐩𝐫𝐞𝐧𝐝𝐞𝐝𝐨𝐫𝐚𝐬 𝐝𝐞 𝐋𝐚 𝐄𝐬𝐩𝐞𝐫𝐚𝐧𝐳𝐚 (Femmes entrepreneuses de La Esperanza). Nous y avons notamment retrouvé 𝐝𝐨𝐧̃𝐚 𝐒𝐡𝐢𝐫𝐥𝐞𝐧𝐲 𝐂𝐚𝐫𝐝𝐨𝐧𝐚 et sa fille, 𝐊𝐚𝐭𝐞𝐫𝐢𝐧𝐞, maintenant âgée de 13 ans, qui a été l’une des premières bénéficiaires des potagers pendant la pandémie et a développé un goût prononcé pour le soin des plantes.
Après avoir aidé à planter des oignons, nous avons partagé un moment de convivialité et goûté différents aliments issus du potager comme la sauce chimichurri, préparée en direct par deux jeunes bénéficiaires de la Esperanza.
Nous avons également dégusté de délicieuses préparations servies sur des feuilles de bananiers : une tarte à la courge, un dessert à base de figue et de fromage, de la jalea blanca et negra (une gelatine dense et sucrée, de couleur blanche ou noire, faite à base du cartilage issu du pied de porc).
Nous avons pu apprécier les produits du potager, mais également la dimension sociale de cette initiative qui permet aux femmes du hameau de se retrouver et de partager un moment convivial malgré les difficultés qu’elles rencontrent au quotidien, liées à leur isolement et leur situation économique.



Le lendemain, nous avons poursuivi notre visite en nous rendant au potager communautaire de Peralonso, situé environ à une heure de Santuario. Nous y avons retrouvé un collectif de femmes qui s’occupent du potager au milieu duquel pousse un goyavier et qui commercialisent différents produits : café, confiture à la goyave, sauce à base de légumes vinaigrés. Nous avons pu constater les difficultés rencontrées par la communauté liées à la sécheresse (« phénomène del niño ») et aux fortes chaleurs sévissant dans tout le pays.
Notre tournée s’est terminée par une visite du jardin resplendissant de Don Luis, agriculteur qui aide volontairement ses voisines du hameau.
décembre 2023
Cette année encore, ce sont neuf potagers communautaires et pédagogiques qui ont verdi, fleuri et ont resserré les liens entre élèves des écoles rurales, mères de famille et équipes pédagogiques. Nous vous invitons à effectuer avec nous, de manière virtuelle, la visite des potagers de William Galicia en centre-ville, du groupe de femmes Tangaras multicolores de Peralonso, de don Luis López, du groupe Mujeres Emprendedoras de La Esperanza, ou encore le potager de l'école primaire locale. Ces initiatives, appuyées par vos généreux dons, ont contribué à renforcer la sécurité alimentaire. Ainsi, les fruits, plantes aromatiques et légumes produits ont pu être utilisés dans la cuisine des familles bénéficiaires du projet et dans les écoles des hameaux de Santuario. Mais surtout, ces familles et groupes de femmes ont pu renouer un lien avec la terre, et se réapproprier des pratiques agricoles locales et des recettes traditionnelles pour utiliser leurs récoltes.

En cette joyeuse saison des fêtes, nous célébrons l'année écoulée, marquée par l’engagement de l’équipe de Corpocam, et notamment de Mónica Castañeda et Martha Herrara qui accompagnent sur place les écoles rurales et groupes de femmes bénéficiaires. Juan, du côté de Myosotis, s’est réuni presque toutes les semaines avec ces dernières pour assurer un suivi plus rapproché du projet et mieux en saisir les difficultés, besoins et dépenses. Aussi, avec le budget subsistant à la fin des activités pédagogiques prévues, nous avons pu offrir aux bénéficiaires du projet, n’ayant pas souvent l’occasion de participer à des loisirs en dehors de leur hameau, une sortie de fin d’année au cours de laquelle ils ont pu se baigner et assister à un spectacle de cirque.
Mónica nous a fait part de sa gratitude pour ce suivi de proximité inédit par les mots traduits ci-dessous :
« Je tiens à exprimer mes sincères sentiments de gratitude pour cette merveilleuse année que nous avons passée et en cette période de Noël, pour les moments magnifiques partagés et l'immense solidarité avec laquelle nous avons mené à bien cette belle mission.
Non sans vous remercier au préalable pour la confiance, la patience et le fait que CORPOCAM ait pu perdurer. Je vous aime beaucoup. »

Martha Herrera, de Corpocam, et les femmes de Tangaras multicolores dans le hameau de Peralonso

Nous espérons, pour l’année à venir, continuer de semer les graines d'un changement durable, cultivant non seulement ces potagers expérimentaux mais aussi des liens solides au sein de cette communauté franco-colombienne.

Visite de Juan et Laetitia à l'école du hameau de Planes de San Rafael, septembre 2023
Santuario, décembre 2022
Entretien avec Adriana, volontaire à Santuario pendant un mois
Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Adriana, j’ai 32 ans et je suis franco-colombienne. Je suis la demi-sœur de Juan! Je suis ingénieure de recherche en chimie (dans le domaine des batteries). Je pratique la capoeira et je joue de la guitare :)
Qu’est-ce qui t’a amenée à vouloir réaliser un volontariat en Colombie?
Depuis plusieurs années, j’avais le projet de venir passer plusieurs mois en Colombie pour mieux connaitre et tisser plus de liens avec mon deuxième pays. Jusqu’à présent, je n’étais venue que sur des périodes d’un mois. Cette année j’ai demandé un congé sabbatique auprès de mon employeur et je suis donc en ce moment en Colombie pour une période de 8 mois. Je voulais réaliser des volontariats en Colombie et pas seulement voyager, afin d’être un peu utile à la communauté et d’aider dans des projets de solidarité, mais aussi d’être plus impliquée dans la vie locale en restant longtemps à un même endroit et en m’intégrant dans un projet sur place.
Quelles ont été tes impressions en découvrant, à Santuario, l’équipe de Corpocam et le projet « Biodiversité et sécurité alimentaire » soutenu par Myosotis?
J’ai été très bien accueillie par l’équipe de Corpocam, Monica, Rosa, Camilo… Et je me suis sentie comme en famille! Le projet « Biodiversité et sécurité alimentaire » leur tient à cœur par conviction et par l’envie aussi de voir leur village et la communauté de Santuario s’améliorer tout en préservant la nature environnante et le Parc national naturel El Tatama. Notamment, Rosa a été garde-forestier du Parc pendant une vingtaine d’années et la préservation de la nature lui tient beaucoup à cœur.
Quels sont, selon toi, les avantages des potagers que tu as pu visiter?
J’ai surtout été touchée par certains potagers communautaires, comme dans les hameaux de La Esperanza et Peralonso, qui avaient une belle production et pour lesquels plusieurs personnes sont impliquées dans son entretien et se montrent très enthousiastes. Ils m’ont parlé de la bonne entente et l’union de leur groupe autour de ce potager communautaire, qui leur permet d’éviter d’avoir à acheter certains aliments et parfois de vendre les excédents au marché paysan.
Qu’est-ce qui pourrait être amélioré ?
Il me semble important de continuer à soutenir les bénéficiaires pour vendre leurs excédents au marché du village (notamment en contribuant à payer le transport). Mais peut-être que ce serait encore plus pratique et simple pour eux d’arriver à s’organiser avec leur voisinage pour éviter les longs transports (minimum 1h, voire 2h jusqu’au village) et donc voir comment les soutenir pour organiser un marché sur place (dans le hameau) ou une distribution dans leur voisinage ?
Par ailleurs, en plus des ateliers « généraux » qui ont été donnés (comme par exemple préparation d’engrais bio), il serait peut-être bien également d’avoir une personne avec des compétences plus spécifiques en agriculture durable et qui soit en mesure d’apporter un appui plus approfondi aux différents bénéficiaires.
Que disent les enseignantes des écoles rurales – ou d’autres participants ou témoins – du projet « Biodiversité et sécurité alimentaire »?
Les enseignantes avaient l’air assez enthousiastes avec le projet de potager dans l’école [lorsqu’Adriana se rend à Santuario, l’année scolaire est déjà finie et les potagers dans les écoles sont en pause]. Notamment, une des profs m’a expliqué qu’elle utilisait le potager dans plusieurs matières, par exemple pour les cours de maths, d’art plastique et de biologie.
Quelle est l’expérience en lien avec le volontariat qui t’as le plus marquée? Pourquoi?
Les échanges avec les paysans dans les fincas dans les hameaux, qui m’ont permis de mieux comprendre la vie paysanne en Colombie. Et leur générosité, car où que nous allions on nous offrait à boire ou à manger ou des fruits et légumes à ramener.
J’ai aussi eu la possibilité de proposer un atelier d’initiation à la capoeira à des jeunes du village et c’était un chouette moment.
Autre vécu que tu souhaites raconter / impressions sur le village?
Le village est très joli, entouré de belles montagnes vertes, il y a beaucoup d’eau et la terre est très fertile dans ce coin. De plus, l’ambiance du village est sympa, les gens sont très aimables et te saluent dans la rue. Et le climat est doux.

Adriana en compagnie de l’un des retraités en charge du potager de la maison de retraite